Première pépite de l'année 2014 . Un récit émouvant, passionnant que j'ai dévoré en une nuit.
"Papa m'a demandé de l'aider à en finir." Je me répète cette phrase, elle sonne bizarrement. Qu'est-ce qui ne
colle pas ? "Papa" et "en finir"?
Avec Tout s'est bien passé, Emmanuèle Bernheim livre le récit haletant et bouleversant de son impensable
aventure" nous annonce la quatrième de couverture.
Recit bouleversant et pour cause : il aborde le thème trés actuel et trés sérieux de l'euthanasie.
Un récit rédigé d'un trait , sans chapitre.
Une histoire qui démarre sur les "chapeaux de roue" puisqu'on suit la narratrice dans le métro, on ressent son inquiètude,
son stress, sa nervosité, et soudain on comprend la raison de cette agitation : l'AVC de son père, son admission aux urgences.
A partir de là, on suit les visites au malade, son évolution : déchéance et progrés. On rencontre la famille, Pascale la
soeur qui comme la narratrice se divise entre sa famille, son travail et l'hôpital.
Mais le pire reste à venir : la volonté du père d'en finir. Et comme il ne peut plus se débrouiller seul, il demande à
sa fille de l'aider.
Commence un calvaire moral pour la narratrice : accepter, se soumettre à la volonté de son père, entreprendre les démarches,
trouver une solution. Et celle-ci se trouve en Suisse, auprés d'une association qui prône l'autodétermination, le suicide assisté.
J'ai aimé :
Le thème est évoqué simplement, comme la vie l'amène. Dans une écriture "clinique" comme les diagnostics des médecins :
simple, rapide, précise. Pas de fioritures ni de descriptions alambiquées, mais des émotions naturelles et sincères que tout à chacun peut comprendre et ressentir face à un tel problème :
l'évocation de la maladie, de la dégénérescence, de la fin de vie de nos proches en l'occurrence ici de nos parents.
Ce récit entraine forcèment un retour sur soi et une réflexion , et nous permet en plus d'acquérir des informations sur cette
pratique dans les pays limitrophes.
Mais ce récit est aussi un formidable éloge : la narratrice nous dresse le portrait actuel mais aussi ancien de son père,
celui d'un homme original voire fantasque, vivant, amoureux de la vie : les relations humaines, le vin, le champagne, la nourriture, l'art, les sorties, les musées et expositions, l'amitié et
l'amour.
L'éloge d'une fille à son père.
Et surtout je comprends seulement à la fin du texte, lors de l'évocation du prénom de la narratrice et de son nom de famille
que ce récit est un récit de vie authentique, un passage autobiographique :
c'est la fin de vie de son père, en 2008, à l'âge de 88 ans que l'auteure Emmanuèle Bernheim
raconte.
Une oeuvre sublime de pudeur et de tendresse, qui m'a touché au coeur.